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Dimanche avant Noël

Frères et soeurs dans le Seigneur,
En ce dimanche avant Noël – 4ième dimanche de l'Avent en Occident – la
liturgie nous donne la généalogie de Jésus – littéralement saint Matthieu écrit : Livre
de la genèse de Jésus Christ – suivie de l'annonce faite à Joseph, qui est parallèle à
l'Annonciation faite à Marie, en saint Luc. Jésus s'enracine dans le peuple élu, en Lui
toute l'histoire d'Israël trouve son sens, son accomplissement. Celui qui est avec
nous tous les jours, jusqu'à la fin des temps, le Ressuscité, est présent dans le dessein
de Dieu, comme Promesse, comme Messie, Celui en qui l'Alliance avec Israël va
devenir universelle et nouvelle, pure grâce et englobant désormais les païens. Nous
retrouvons d'une certaine manière la même approche dans le long chapitre 11 de
l'épître aux Hébreux qui raconte l'histoire de la foi, avec une nuée de témoins qui
nous entoure. Le lectionnaire byzantin a retenu surtout les martyrs d'Israël de
l'époque des Maccabées. Les premiers versets entendus mentionnent des noms que
l'on retrouve dans l'Evangile : Abraham, Isaac et Jacob : Dans la foi, ils moururent
tous, sans avoir obtenu la réalisation des promesses, mais après les avoir vues et
saluées de loin et après s'être reconnus pour étrangers et voyageurs sur la terre (v.
13). On pourrait dire qu'ils sont exemples de la foi qui devient espérance du salut.
Un autre nom qui est mentionné est celui du roi David, nom qui reviendra dans
l'annonce à Joseph. Si saint Luc – dans sa généalogie à lui – remonte de Joseph à
Adam, saint Matthieu, lui, descend d'Abraham à Joseph.
Lorsque l'ange du Seigneur lui apparut en songe, il lui dit : Joseph, fils de
David. Ceci est capital dans la compréhension de l'évangile. C'est par la paternité
légale de Joseph, que Jésus sera considéré descendant de David. Matthieu a
commencé son récit en disant : Généalogie de Jésus Christ, fils de David. Et nous
connaissons le début de la lettre de saint Paul aux Romains, disant qu'il annonce
l'évangile de Dieu concernant son Fils, issu de la lignée de David selon la chair (1,
3). Mais revenons à l'annonce faite à Joseph. Il ne connaît pas encore l'origine de
l'enfant à naître. Il sait seulement que ce n'est pas lui qui en est le père. La justice de
Joseph évoque son intégrité, sa droiture, son renoncement, son obéissance de la foi.
Central dans le récit est le verset 20 : Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre
chez toi Marie ton épouse, car ce qui a été engendré en elle vient de l'Esprit Saint.
Cette origine divine de l'Enfant est attestée ainsi chez saint Luc, où l'ange Gabriel dit
à la Vierge Marie : L'Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très Haut te
couvrira de son ombre ; c'est pourquoi celui qui va naître sera saint et sera appelé
Fils de Dieu (Lc 1, 35). Au centre du mystère de Noël se trouve la foi de l'Eglise
chrétienne en l'Incarnation du Verbe. L'origine de Jésus se situe dans le mystère de
Dieu lui-même. La naissance d'une vierge est un message sur la manière dont le salut
vient à nous : « dans la simplicité de l'accueil, comme don absolument gratuit de
l'amour qui rachète le monde » (J. Ratzinger, Foi chrétienne hier et aujourd'hui, p.
194).

Arrêtons-nous encore un instant au nom de Jésus – le Seigneur sauve – c'est
Lui qui sauvera son peuple de ses péchés. Pour beaucoup de gens, actuellement, cela
ne veut pas dire grand-chose. Car, si tout le monde est d'accord pour dire qu'il y a du
mal dans le monde : le mal existe dans des structures, dans des personnes qui font le
mal aux autres, parfois cruellement ; c'est plus difficile d'admettre que le péché nous
habite et de reconnaître personnellement que l'on est pécheur, que quelque part on
bloque la libre circulation de l'amour divin dans l'histoire. Le bonheur, tout le monde
le veut. Mais le salut promis par Dieu, est-ce qu'on s'y intéresse ? Le croyant, lui,
espère en l'accomplissement des promesses du salut de Dieu. Notre coeur est
insatisfait sans la présence du Sauveur. Ce n'est que lorsqu'on a rencontré dans la foi
Celui qui est, qui était et qui vient, que l'on peut se rendre compte que l'on est
pécheur et pécheur appelé par l'amour miséricordieux, appelé à cette enfance
spirituelle, dont Joseph, Marie, Elisabeth, Zacharie et Jean-Baptiste, et tant d'autres,
sont déjà témoins. Que donc le saint Nom de Jésus nous rappelle notre vocation
d'enfants de Dieu, de candidats à la sainteté.
Nous aussi, frères et soeurs, appartenons à ce peuple de Dieu, notre vie aussi
peut être lue comme une histoire sainte, une histoire d'attente de l'accomplissement
des promesses, car le mystère du Christ est inépuisable et c'est en nous, dans les
membres de son corps, qu'Il veut vivre désormais son amour du Père et son amour
des hommes. Emmanuel – Dieu avec nous – n'est-il pas le centre de toute la
révélation biblique , Dieu qui nous dit : « n'ayez pas peur, soyez sans crainte » ?
C'est dans une nuit de foi que Joseph a accueilli le signe de la Vierge qui
enfantera l'Emmanuel, le Sauveur, la Lumière du monde. Dieu nous donne encore ce
signe si nous savons ouvrir les yeux de notre coeur, au-delà du criticisme, au-delà
des doutes ou de l'indifférence. Dans un monde où le chacun-pour-soi semble
dominer, si ce n'est la violence et l'injustice, Dieu dit qu'Il est avec nous, en nous,
pour que nous soyons avec Lui, en Lui et qu'ensemble avec nos frères et soeurs en
humanité, nous devenions Corps du Christ, création nouvelle. Je termine avec une
maxime de saint Jean de la Croix, qui peut nous exhorter à garder un minimum de
recueillement à l'approche de la nuit de la Nativité : Le Père a dit une parole, qui est
son Fils (Jn 1, 18), et Il la dit toujours dans un éternel silence, et c'est dans le
silence que l'âme l'entend (Sg 18, 15). Amen.