Nous avons certainement tous déjà vécu une situation où notre téléphone ou notre ordinateur ne parvient pas à se connecter à notre serveur. Une situation difficile : les contacts avec l'extérieur diminuent ou sont interrompus, il devient difficile de continuer à travailler, l'impatience, le mécontentement, la colère, voire la panique nous envahissent. Bref, nous sommes malheureux. Regardons maintenant le monde d'aujourd'hui : catastrophes naturelles, guerres, violence, utilisation d'armes ou de couteaux pour tuer, dépendances dans de nombreux domaines, et la liste est encore longue. L'homme d'aujourd'hui ne va pas bien. Comment en est-on arrivé là ? Se pourrait-il que l'humanité actuelle ait perdu le contact avec son serveur ? Avec qui ? Avec Dieu, qui nous a tous créés et nous a fait exister, qui nous maintient en vie pour toujours ; oui, toute l'humanité dépend de Dieu et beaucoup ignorent qu'Il vit au plus profond de notre cœur ou de notre esprit. L'homme n'est pas seulement un être profane, mais aussi un être sacré. Dieu, notre « serveur », nous envoie ses ondes, ses rayons, parce qu'Il nous a créés par amour et miséricorde. Il se révèle. Lorsque le peuple de Dieu était en Égypte, Il fait savoir, Il prend l'initiative : « J'ai vu la misère de mon peuple, j'ai entendu ses cris face à ses oppresseurs. En vérité, je connais ses souffrances » (Ex 3,7) et Moïse reçoit sa mission, en tant que chef du peuple. Plus tard, sur le mont Sinaï, le Seigneur révèle, dans la mesure où nous pouvons le comprendre, son Être, sa nature : « Moi, le Seigneur, je suis un Dieu miséricordieux et compatissant, lent à la colère, plein d'amour et de fidélité. » Cette révélation de soi constitue le fondement de la foi en la miséricorde de Dieu. Dans le livre du Deutéronome, le Seigneur dit : « Car le Seigneur, ton Dieu, est un Dieu miséricordieux : il ne t'abandonnera pas et ne te détruira pas ». (4,321) Les psaumes (Ps 86,15 ; 103,8 ; 145,8) parlent également de la miséricorde de Dieu : « Le Seigneur est miséricordieux et compatissant, patient et riche en fidélité ; comme un père a compassion de ses enfants, le Seigneur a compassion de ceux qui le craignent. » Même lorsque le peuple de Dieu rompt sa relation avec Lui et que le Seigneur en est attristé dans son cœur, Il reste fidèle : « Mais Il est resté miséricordieux, Il leur a pardonné leur faute et ne les a pas détruits. Combien de fois a-t-Il réprimé sa colère et a-t-Il évité de laisser éclater sa fureur. » (Ps 78,38) « Car sa miséricorde est éternelle, nous dit le psaume 136). Les prophètes montrent eux aussi que la miséricorde de Dieu est plus forte que sa colère. Ainsi chez Isaïe : « Je t'ai abandonné un instant, mais je te rassemblerai avec une miséricorde éternelle. » (Isaïe 54,7) En bref, la miséricorde de Dieu n'est pas une idée abstraite, mais une réalité concrète par laquelle Il révèle son amour avec tendresse, compassion, indulgence et pardon. Mais la miséricorde de Dieu prend visage parmi nous à travers Jésus-Christ, le Fils de Dieu. Jésus éprouve au plus profond de son cœur une grande compassion pour la foule qui le suit, lorsqu'il voit qu'elle est fatiguée et épuisée. Fort de cet amour compatissant, il guérit les malades qui lui sont amenés et, avec quelques pains et quelques poissons, il apaise la faim de grandes foules. Ce qui animait Jésus en toutes circonstances, ce n'était rien d'autre que la miséricorde avec laquelle il lisait dans le cœur de ses interlocuteurs et répondait à leur désir le plus profond, celui d'être délivrés de leurs souffrances. Quand il a rencontré la veuve de Naïm, qui portait son fils en terre, il a éprouvé une profonde compassion pour l'immense chagrin de cette mère affligée et lui a rendu son fils en le ressuscitant d'entre les morts. Après avoir libéré le possédé de Gerasa, il lui confie cette mission : « Va chez les tiens, dis-leur tout ce que le Seigneur a fait pour toi et comment il t'a fait miséricorde » (Mc 5, 19). Dans les paraboles de Jésus consacrées à la miséricorde, celle de la brebis perdue, celle de la pièce égarée et celle de l’enfant prodigue, Dieu est toujours présenté comme plein de joie, surtout lorsqu'il pardonne. Nous trouvons là le cœur de l'Évangile et de notre foi, car la miséricorde est présentée comme la force qui triomphe de tout, qui remplit le cœur d'amour et console par le pardon. Une autre parabole nous donne en outre un enseignement pour notre vie chrétienne. Interrogé par Pierre sur le nombre de fois qu'il faut pardonner, Jésus répond : « Non, je te le dis, non pas sept fois, mais soixante-dix fois sept fois » (Mt 18, 22), et il raconte la parabole du « serviteur impitoyable », qu'il conclut par ces mots : « Ainsi mon Père céleste agira-t-il envers chacun de vous, si vous ne pardonnez pas de tout cœur à votre frère » (Mt 18, 35). Les paraboles contiennent un enseignement profond pour chacun de nous, elles nous interpellent avec insistance. Jésus dit que la miséricorde n'est pas seulement l'action du Père, mais qu'elle devient le critère pour comprendre qui sont ses véritables enfants. Bref, nous sommes appelés à vivre dans la miséricorde, car c'est à nous que la miséricorde a d'abord été accordée. La miséricorde est le critère de crédibilité de notre foi : « Soyez miséricordieux, comme votre Père est miséricordieux » (Lc 6, 36).

