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Neuvième dimanche après Pentecôte

Frères et soeurs dans le Seigneur,

 

          Après la multiplication des pains, Jésus veut que les disciples accomplissent seuls la traversée du lac, pendant que Lui-même renvoie les foules vers leur vie ordinaire, après les avoir nourri de sa parole et du pain. Il gravit la montagne pour prier dans un seul à seul avec son Père. Dieu nous appelle parfois – souvent même – à quitter le bruit, extérieur et intérieur, pour rentrer en nous-mêmes, dans un coeur-à-coeur avec Lui, un silence habité par la Présence ineffable de l'Esprit. Lorsque nous avons l'impression de ne pas pouvoir prier comme il faut, offrons simplement les gémissements de l'Esprit du Christ. Jésus n'est pas dans le passé, Il est toujours vivant et Il intercède pour nous. Nous pouvons toujours rejoindre sa prière, par un acte de foi tout simple. Jésus gravit la montagne pour prier...

          Tandis que les gens rentrent chez eux et que Jésus prie sur la montagne, que se passe-t-il avec le groupe des Douze ? Leur bateau est malmené par les vagues. Ils ont déjà affronté une fois une tempête alors que Jésus dormait dans la barque. Maintenant ils sont seuls au coeur de la tourmente et c'est la nuit. Vers la fin de la nuit Jésus vint vers eux en marchant sur la mer. Mais les disciples ne le reconnaissent pas. On pense à certains récits d'apparitions du Ressuscité : en Lc 24, 37 on lit : Effrayés et remplis de crainte, ils pensaient voir un esprit. Et le Seigneur de changer leur trouble en paix et joie. - La mer, le lac, pouvait être un symbole de la mort et Jésus qui marche sur la mer annonce déjà sa victoire dans la future Résurrection.

          On peut se demander pourquoi Jésus ne se révèle pas d'emblée plus clairement dans cette situation déjà pénible. Les disciples projettent leur peur sur Lui et le prennent pour un fantôme. Ce qui n'est pas très rassurant ! Lorsque le monde invisible fait irruption dans le sensible, on ne sait pas toujours avec quel sorte d'esprit on a à faire. Ce n'est pas pour rien que les grands spirituels mettent en garde contre la recherche des visions avec image, pour éviter le risque d'être trompé. Dans notre récit, le passage par la peur, chez les Douze, doit avoir un sens. Le Seigneur ne se révèle pas toujours selon notre attente immédiate. Il faut donc apprendre à vaincre la peur par la confiance.

         Aussitôt Jésus leur parla : Confiance, c'est Moi, n'ayez pas peur ! Il n'attend même pas qu'ils crient vers Lui comme lorsqu'ils le réveillèrent quand Il dormait. Il prend les devants. Ce qu'Il dit – Courage, c'est Moi – traverse toute l'histoire du salut. Dieu enlève l'effroi de l'homme et lui promet sa grâce, sa bienveillance. Jésus n'est toujours pas dans le bateau. Maintenant ils savent que c'est Lui qui marche sur les eaux.

          Pierre, lui, ne veut pas simplement attendre le Seigneur. Il est audacieux. Ce n'est pas Jésus qui prend l'initiative et donne l'ordre de venir vers Lui en marchant sur les eaux. Le Christ n'impose pas cette difficulté supplémentaire. C'est l'amour qui fait prendre des risques. Nous connaissons le reste de l'histoire. L'apôtre nous montre que souvent nous sommes ballottés entre audace filiale et peu de foi. Le doute et la peur viennent, reviennent, lorsque Pierre ne regarde plus le Seigneur mais les vagues : le vent sur les eaux. Il n'est plus dans la barque qui donnait encore un peu de protection et il n'est pas encore arrivé près de Jésus qui l'a appelé vers lui, sur sa propre initiative. Le doute vient lorsque nous oublions la présence du Christ, en nous fixant sur les difficultés qui nous entourent et qui risquent de nous envahir. C'est que la Présence du Seigneur n'est pas toujours évidente ; elle est comme cachée. C'est même souvent comme cela. Il faut le silence, surtout intérieur, pour découvrir que nous sommes le temple de l'Esprit et pour percevoir le passage du Seigneur dans le bruit d'une brise légère, comme le prophète Elie. Une fois les tempêtes de tout genre apaisées, le calme permet l'émerveillement. Qui est-Il (Mt 8, 27), se demandait-on déjà ; maintenant on se prosterne devant le Seigneur en disant : Vraiment, Tu es Fils de Dieu ! (Mt 14, 33).

          Il n'est pas difficile, frères et soeurs, de nous reconnaître, en Eglise et personnellement, en cette scène d'évangile. C'est à chacun de nous, que parfois Notre Seigneur doit adresser ce reproche : Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? Tout était pourtant bien commencé. Mais, ce reproche de Jésus est plein de douceur, c'est aussitôt qu'Il étendit la main pour saisir Pierre. - Le Seigneur est avec nous dans la ou les tempêtes que nous traversons, à tous les niveaux ; inutile de les énumérer encore une fois. Il veut nous faire grandir en confiance et en audace. Que nous puissions découvrir sa présence dans le murmure d'une brise légère – le son d'un fin silence (?) - afin de pouvoir traverser les moments difficiles.